Regards sur l’éducation 2008
C’est le nom de la brochure éditée par l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE), qui vient de paraître le 9 septembre 2008, disponible en PDF ici (551 pages). C’est une montagne de documents, de résultats d’enquêtes, de graphiques, et c’est assez rébarbatif à consulter. On y trouve la fameuse étude PISA, qui a vu la France rétrograder dans le classement international. Toutefois, cela vaut la peine d’y aller fouiner un peu ; on y découvre quelques informations peu médiatisées, voire totalement ignorées du grand public. Comme celle-ci, à la page 128 du PDF, indicateur A6, graphique A6.1. L’idée était de demander à 10 pays de l’OCDE de sonder les parents (la France n’y figure pas) avec la question suivante :
« Lorsque votre enfant avait environ 10 ans, à quelle fréquence lisait-il des livres sur les découvertes scientifiques ? ».
Conclusion de l’OCDE (consultez le graphique A6.1) :
« Par rapport aux élèves de 15 ans, qui, à 10 ans, n’avaient lu aucun livre sur les découvertes scientifiques, les élèves qui en ont lu obtiennent à l’évaluation PISA 2006 des compétences en sciences un score plus élevé de 45 points en moyenne, ce qui équivaut à une année scolaire. Cet avantage reste prononcé, à 35 points, même après prise en compte des facteurs socio-économiques (une année scolaire correspond en moyenne à 38 points sur l’échelle PISA de culture scientifique). »
Une conclusion pareille n’est pas anodine. Elle est porteuse d’une idée jamais exprimée dans notre paysage médiatico-politique : le social interagit avec l’éducatif. Le social, c’est-à-dire la vie familiale, la vie à l’extérieur de l’école, les influences transversales. L’éducation est d’abord apportée par la famille, ne serait-ce que chronologiquement. L’enfant arrive à trois ans à l’école chargé d’une culture familiale, d’acquis, d’habitudes, de façons de penser différentes de celles du petit voisin. L’école doit composer avec ce foisonnement.
La conséquence positive (gain de presqu’un an) retenue de la lecture de livres scientifiques à l’âge de 10 ans montre le grand pouvoir éducatif qu’exerce le milieu dans lequel évolue l’enfant. Bien sûr l’école doit apporter cette culture à ceux à qui elle manque, mais l’école, ça marche mieux quand le social suit.
Actuellement, avec le niveau de vie qui dégringole et les soucis qui s’accumulent, les familles engluées dans la précarité n’ont pas la disponibilité nécessaire pour penser à toutes les pistes éducatives qu’elles devraient faire suivre à leurs enfants. Parallèlement, l’exigence augmente du côté de l’école : les évaluations sur les acquis scolaires commencent dès la petite section ! Comment réconcilier ces difficultés ? Les « politiciens » de tous pays n’ont guère intérêt à mettre en exergue ce phénomène de lien étroit entre l’éducatif et le social, car cela nécessiterait d’y remédier un tant soit peu… du côté du social. Rendre la vie plus facile aux parents afin de les rendre à leurs enfants, voilà un beau projet politique ! Je ne m’étonne pas de n’en avoir jamais entendu parler…