Polluez par ci, ne polluez plus par là
Yann Arthus Bertrand incarne à lui tout seul le grand business écolo dans toutes ses dimensions contradictoires. Pendant 10 ans, il a suivi le Paris-Dakar du haut d’un hélicoptère, qui, on le sait, est un engin très économe en énergie et très écolo. Profession oblige, il lui fallait de la hauteur pour « shooter » les engins qui vrombissaient sous son objectif. Tant pis si cette course insensée et intrusive pollue et tue.
Puis ce fut, toujours du haut de son hélice, les séries de photos « vues du ciel » pour populariser la beauté du monde dans ses livres. Très vite, YAB a fait la morale à tout le monde. Mais il a rencontré des rebelles, qui l’ont mis en face de ses contradictions : je pollue, je ne suis pas coupable ; vous polluez, vous êtes coupable. Quelque chose ne colle pas. Sans compter que, non content de donner le mauvais exemple, il fait financer son film « Home » par de gros pollueurs : Pinault, à la tête du Printemps, La Redoute, la Fnac, Conforama, qui eux aussi sillonnent le monde. En camions électriques ?
Alors YAB a eu une idée : je pollue, mais je compense. L’idée est vraiment géniale puisqu’elle n’empêche pas le quidam de voyager comme bon lui semble, mais le déculpabilise en finançant par ailleurs un projet pour les pays défavorisés. Pour ce faire, il a créé une fondation, Good Planet, très vite reconnue d’utilité publique, laquelle recueille vos sous (85 euros si vous faites Paris-Tokyo) quand vous commettez le forfait de prendre l’avion. Vous allez polluer, certes, mais vous savez qu’ailleurs, en particulier dans les pays en difficulté énergétique, il y aura par exemple…. une nouvelle façon de cuire les aliments en Inde, avec de la bouse de vache (au lieu de bousiller leurs forêts !). On n'arrête pas le progrès.
Comme moi, vous pouvez donc constater que rien ne change : les pays riches et pollueurs pourront toujours émettre leurs gaz, ils auront juste à payer un peu plus, et les autres recevront une obole pour être maintenus dans la dépendance énergétique, ou se débrouiller avec leur bouse. Philosophie signée YAB.
Source des infos : Les profiteurs du bizness écolo - Les dossiers du Canard enchaîné d'avril 2010